La commanderie de Cazouls

La Commanderie au cours des siècles

La construction de la commanderie débute vraisemblablement entre 1150 et 1183. Les templiers, présents à Pézenas depuis 1131, débordent d’activités dans le secteur et décident sans doute alors d’y établir une nouvelle base. Ils choisissent Cazouls d’Hérault, village isolé situé entre l’Hérault et la Boyne, mais disposant d’un petit port.

Active dès 1203 sous l’autorité du commandeur de Pézenas, la commanderie accueille son propre commandeur en 1225, Petrus de Lesignano (Frère Pierre de Lezignan). Lui succèdent après 1238 Garinus (Frère Garin), Petrus de Casa (Frère Pierre de Lacase), Colratus (Frère Colrat), Raimundus de Podiono (Frère Raymond de Puéchabon) et Stephanus Trobat (qui sera jeté en prison comme nombre de ses pairs le 13 octobre 1307 au cours des arrestations ordonnées par Philippe le Bel et Guillaume de Nogaret). Comme toutes les Commanderies, celle de Cazouls possède des « granges » ou « maison du temple », c’est-à-dire des domaines et/ou des villages qui dépendent de son autorité. On en compte quatre : Ses annexes de Lézignan la Cèbe et d’Usclas et les maisons de Cabrières et d’Abeilhan. Située à trois ou quatre lieues du port de Mèze que la flotte templière fréquente régulièrement, la commanderie de Cazouls accueille alors une population en partance pour l’Orient (soldats, pèlerins ou marchands) et des chevaux. Après la disparition de l’Ordre du Temple et la dévolution de leurs biens, les Hospitaliers s’installent dans les commanderies où ils dispensent leurs bons soins. La Commanderie hospitalière de Cazouls revient alors à celle de Pézenas qui elle-même dépend du Prieuré de Saint Gilles. Peu d’informations subsistent de cette période que l’on peut cependant imaginer difficile en raison de la terrible peste de 1348 et les nombreuses disettes provoquées par les dévastations de la guerre et le brigandage.

À la fin du XVI e siècle, les Hospitaliers (devenus Chevaliers de Malte) qui se sont retirés à Pézenas décident de vendre une partie de leurs biens sur Cazouls, inoccupés depuis longtemps et d’entretien onéreux. Ils conservent sans doute la partie des communs, la « ferme », et vendent le château à une famille noble du Vivarais. Cazouls devient de ce fait une co-seigneurerie. Thimoté de Montchal acquiert la Commanderie et les terres. En 1635, sa petite-fille Anne épouse Gaspard de Murviel alors seigneur d’Aumes (Village proche) et lui transmet le château et les terres en dot. Leur petite-fille apportera à son tour en dot le domaine à son époux Henri II de Carrion de Nizas en 1712. En 1768, toujours par mariage, la commanderie entrera dans les biens de Ferdinand Spinola di Arquata. Entre le XIV e et le XVIII e siècle, sous l’impulsion des différents commandeurs la commanderie devient une exploitation agricole prospère basée notamment sur la culture de la vigne. En 1736, on plante des saules et des peupliers pour protéger les terres inondables. En 1761, la plupart des champs sont bordés de muriers. Le dernier commandeur, le prince Camille de Rohan a une vingtaine d’années quand il est nommé en 1766. Il est déchu de ses droits le 2 novembre 1789 au moment de la Révolution. Les biens de la Commanderie sont ainsi déclarés « biens Nationaux » et vendus. Plusieurs familles bourgeoises locales se partagent alors les terres et les biens.

Le XIX e siècle est surtout marqué par le développement de la « Grande propriété ». La vigne devient la culture unique de la riche plaine d’alluvions de Cazouls. Trois familles constituent de vastes domaines qui, à eux seuls couvrent une bonne partie du terroir et occupe une importante main-d’œuvre. Eugène d’Espous, receveur général des Finances pour le département de l’Hérault, ayant acheté la commanderie et ses terres aux héritiers Spinola y fait construire une immense cave à vins. Grâce à une conjoncture particulièrement favorable, des rendements élevés et une gestion rigoureuse, son exploitation est alors florissante. Son fils, premier Comte d’Espous cèdera la propriété à un marquis Robineau de Rochequairie. Ce dernier se séparera peu à peu du domaine en le morcelant. Différentes familles d’horizon et nationalité diverse se succèdent alors entre la fin du XIX e et le début du XX e siècle dans la commanderie telle qu’elle est aujourd’hui.

La commanderie aujourd’hui La Commanderie de Cazouls d’Hérault, inscrite au titre des Monuments Historiques (ISMH), estrestée globalement en bon état sauf à l’ouest où une tour défensive carrée a été détruite : ne restent que les fondations, une meurtrière et une arbalétière (curieusement à ras de sol). Sur cette base a été édifié le château quadrilatère actuel. Au temps des templiers, c’était le « donjon » ou « Grande maison » où les chevaliers vivaient une vie monacale. Son aspect originel a été largement modifié au cours des siècles, mais le gros œuvre demeure, telle l’imposante tour ronde qui donne toujours une singulière impression de puissance. La seconde tour en état, est une des plus anciennes échauguettes existantes. Entre le XV e et le XVII e siècle, les façades au-dessus du rez-de-chaussée sont démontées, les anciennes meurtrières austères remplacées par des fenêtres à meneaux laissant entrer la lumière. Au XVIII e siècle, une aile est ajoutée sur le côté ouest sur la base d’anciens murs templiers. À la même époque, le bâtiment des communs où travaillaient différents corps de métiers est détruit. Ne restent aujourd’hui que quelques pierres de fondation mises au jour lors des travaux de nettoyage du jardin. Les bâtiments de la « ferme », eux, entouraient une cour centrale ouverte sur l’extérieur par une « porte » monumentale pourvue à l’origine d’une herse. C’est la partie conservée le plus longtemps par les chevaliers de Malte et là que vivaient et s’activaient les gens de métiers (selliers, menuisiers, etc.). C’est aussi là que l’on accueillait voyageurs et pèlerins. De cette partie ne restent que peu de traces. La chapelle, elle, séparaient à l’origine la « Grande maison » de la ferme. Construite par les Templiers, c’était juste une bâtisse rectangulaire sans chevet, transept ni sacristie. Devenue église paroissiale, on lui ajoute un clocher, simple tour couverte de tuiles. Pillée au cours des guerres de religion, elle est longtemps laissée à l’abandon. Au milieu du XVII e siècle l’évêque Clément de Bonzy en ordonne la rénovation, une sacristie est alors ajoutée et la nef pavée. Oubliée au XIX e siècle suite à la construction de l’église du village, elle sert un temps de bergerie avant d’être restaurée en 2008 après l’effondrement d’une partie de la charpente. Les travaux de rénovation de la Commanderie dureront encore quelques années…